Interview avec
SvenSson:
S : Quand
et comment tout a commencé avec la musique?
Sv
: Au début de l’adolescence, à la fin
des
années 80, un repas chez un ami de la famille avait une
quantité incroyable de synthés. Je me suis mis
à
jouer sur l’un d’eux, et on s’est
aperçus que
j’avais l’oreille musicale. Je m’en suis
alors
acheté un, et j’ai commencé
à
composer…
S :
D'où vient ton nom?
Sv
:
Mon prénom dans la vie civile est Steve. Gamin, je trainais
tout
le temps avec mon frère et deux autres gamins du village,
les
frères Martinez, qui, vers mes 13 ans, se sont subitement
mis
à m’appeler Stevenson, puis Svensson, du nom
d’un
joueur de tennis suédois qui brillait alors à
Rolland-Garros. Le surnom est resté quelques
années au
lycée, puis a été oublié,
jusquà ce
que je l’exhume quand j’ai commencé
à faire
de la musique en solo.
S :
Qu’y’a-t’il de positif et de
négatif dans le fait d’être un musicien
en France?
Sv :
Je ne vois pas ça d’un point de vue
géographique,
je pense que la sensation doit être la même partout
dans le
monde. C’est comme la langue d’Esope, la vie de
musicien
est la meilleure et la pire des choses. Ecrire et jouer est un plaisir
total, mais conduit aussi à une forme
d’enfermement dans
son œuvre qui peut se révéler
douloureuse.
S : Quels
musiciens ou artistes ont eu une influence dans ta vie et dans ton
travail?
Sv
: D’abord, au commencement, deux groupes, seulement deux :
The
Cure et Joy Division. Puis les artistes français que
j’ai
découverts plus tard, Murat, Dominique A, Biolay. Et aussi
ceux
que j’ai croisés et avec qui j’ai
collaborés,
d’abord le tromboniste Thomas Boudineau (qui joue
aujourd’hui avec Angil et The John Venture), puis le groupe
toulousain Wok, et aujourd’hui mon guitariste Marc Denis.
Mais
aussi quantité d’écrivains, comme
Lovecraft,
Kundera, Houellebecq, Gracq, Baudelaire, Garcia-Marquez…
S : Tu te
souviens du premier Cd que tu as acheté?
Sv
: Euh, je crois que c’était plutôt un
vinyle, et que
c’était … A-Ha… Sorry,
j’écoutais surtout les hit-parades, quand
j’étais petit… Mais « In
Between Days »
des Cure est arrivé peu après ;-)
S :
Tu introduis souvent dans tes paroles voire même dans tes
titres
des expressions en Anglais, penses-tu que l'émotion
transmise
est différente entre une chanson écrite en
Anglais et en
Français ? Et envisagerais -tu de réaliser un
album
intégralement en Anglais ?
Sv :
Oui, l’émotion est différente,
c’est à
la fois mécanique et métaphysique : les
sonorités
et la structure des mots font que les neurones sont
forcément
stimulés différemment, mais au-delà de
ça
il y a une transcendance de certains sentiments que seules certaines
langues peuvent atteindre. Des correspondances millénaires
entre
les mots et les situations. Je ne sais pas si je suis très
clair, là…
Je n’envisage plus de réaliser un album
intégralement en anglais pour moi-même.
J’ai compris
que j’étais fait de culture littéraire
française d’abord, anglo-saxonne ensuite,
d’autres
pays enfin : mon expression musicale est la plus spontanée
possible, elle reflète donc ce naturel-là. Mais
je
pourrais le faire pour d’autres artistes, en collaboration.
S :
Combien de concerts as-tu déjà fait ?
Sv : Une
soixantaine.
S : Es-tu
nerveux avant un show ?
Sv
: Oui, mais pas toujours de la même manière. Dans
ma
ville, ou devant des gens que je connais, j’ai peur, et
ça
me rend nerveux. Ailleurs, quand il s’agit juste
d’en
découdre devant des inconnus, je n’ai pas peur, je
suis
juste nerveux d’impatience.
S :
Comment définirais-tu la musique de SvenSson?
Sv : Euh,
ça, c’est ton boulot, non ?
Je n’arrive jamais à répondre
à cette
question. Cette musique est trop multiculturelle pour être
définie simplement. Et en plus, elle est
différente sur
scène et sur disque !
Bon, allez, disons chanson-pop-folk-rock-post-new-wave ?
S : Quand
tu écris une chanson tu suis ton coeur, ton cerveau ou ta
main?
Sv : Mon
cœur.
S : Quelle
est ta chanson préférée de SvenSson et
pourquoi?
Sv :
Mon album préféré est le dernier, et
de loin. Mais
ma chanson préférée figure sur le
premier album,
c’est « Etoile Rouge », pour un faisceau
de raisons
personnelles. Mais la chanson-titre du dernier album, «
Perdition
», n’est pas loin derrière.
S :
L'autre Svensson très talentueux que je connais et
apprécie est Peter Svensson, le guitariste des Cardigans,
est-ce
un groupe que tu aimes bien et as-tu déjà
écouté le très bon projet solo de
Peter qui
s'appelle Paus ?
Sv : Je ne
connais pas Paus, mais j’aime beaucoup les Cardigans, surtout
les albums les plus récents.
S : En
tant que musicien quel est ton sentiment vis à vis
d’Internet?
Sv :
Je sais que ça complique la vie des maisons de disques comme
la
mienne, Anticraft, qui prend des risques sur des artistes novateurs et
risque à tout moment des difficultés parce que
les gens
achètent moins de disques qu’avant.
Personnellement, je ne
télécharge pas parce que j’ai un
attachement
sentimental à l’objet musical, et une
icône iTunes
sur mon Mac ne me procure pas la même émotion.
Mais je
n’ai pas de philosophie sur le sujet. Et
j’apprécie
aussi beaucoup les contacts que les sites communautaires comme Myspace
permettent d’établir avec des fans ou des
programmateurs
de concerts.
S : De
combien d'instruments sais-tu jouer?
Sv
: D’aucun instrument correctement, pas même de mes
cordes
vocales. Mais je peux toucher un peu à tout et, en studio,
je
joue de la guitare électrique ou folk, de la basse, des
claviers, et de la batterie. Sur scène, je m’en
tiens au
chant et à la guitare pour l’instant.
S :
Peux-tu nous décrire la journée typique de
SvenSson ?
Sv :
C’est privé.
S : Quels
sont tes hobbies à part la musique?
Sv : La
science, la littérature, et les voyages.
S : Tu as
beaucoup joué dans le Sud de la France, y'a-t'il une ville
que tu trouves plus belle que Toulouse ?
Sv :
J’ai du mal à comparer les villes dans leur
ensemble, car
elles ont toutes des endroits que je trouve beaux et d’autres
horribles, même Toulouse. Mais il y a des lieux et des
fragments
de villes qui m’ont particulièrement
touché,
à Galway, Aberystwyth, Boston, San Francisco,
Genève.
S : Es-tu
une personne aventureuse?
Sv : Je
crois.
S :
Où est-ce que tu aimerais jouer à l'avenir, y-a
t'il un endroit dans le monde que tu adorerais visiter ?
Sv : Jouer
: St Petersbourg, Tokyo, les îles britanniques,
l’Australie, l’Europe de l’Est,
Boston…
Visiter : la planète entière.
S :
Que ce soit dans tes textes ou à travers l'alphabet
cyrillique
présent sur tes pochettes d'album on perçoit un
rapport
intime avec le Russe et la Russie, as-tu un lien particulier avec ce
pays ?
Sv : Oui,
j’ai un lien particulier avec ce pays…
S : Y-a
t'il des choses dont tu as peur ? As-tu certaines phobies?
Sv :
J’ai peur de jouer devant des gens que je connais,
j’ai
peur de décevoir les gens que j’aime et de me
décevoir moi-même, j’ai peur de faire
mal en
écrivant trop durement. Et j’ai la phobie du
fromage et
des oignons !
S :
Comme mon site est dédié aux Manic Street
Preachers
peut-être pourrais tu dire quelques mots à propos
d'eux si
tu les connais ?
Sv
: Je connais un peu, et j’aime beaucoup, même si je
n’ai pas d’album et si je ne les ai jamais vus en
concert.
Ma chanson préférée, parmi les
quelques-unes que
je connais, est « Ocean Spray ».
S
: C'est vrai que c'est une
chanson magnifique, une de mes
préférées moi aussi.
S : Es-tu
d'accord avec Victor Hugo qui a dit que "la mélancolie est
le plaisir d'être triste" ?
Sv : Da.
S :
On sent dans ton répertoire (La chute des corps, Sodium,
Silicium) et tes paroles, l'empreinte de tes études
scientifiques, c'est donc un bon moyen de continuer à te
faire
plaisir à travers la musique ?
Sv :
Non, c’est juste un ancrage, c’est en moi comme le
reste de
ma culture et de mon vocabulaire, il n’y a pas de raison que
je
retienne cette empreinte. Ce n’est pas
délibéré, c’est
spontané.
S :
Ton univers et tes paroles très poétiques me font
penser
à Nick Cave, est-ce un artiste que tu apprécies ?
Sv :
Merci. Oui, je l’apprécie
énormément, avec un petit faible pour les
« Murder Ballads ».
S :
On dit que " Le poète comprend la nature mieux que l'homme
de
sciences ", qui donc peut connaitre et peindre la nature mieux que
SvenSson ?
Sv
: Non, je crois que la poésie et la science conjuguent leurs
efforts pour vous faire réaliser qu’on ne comprend
rien
à rien. En tout cas, moi, plus j’avance, moins je
comprends.
S :
Je sais que c'est une question difficile, mais si tu ne devais garder
qu'un seul album de ta collection de Cds, quel album est-ce que ce
serait?
Sv :
Ce serait une torture d’écarter « Closer
»,
« Dolores », « Sonic Nurse » ou
«
Remué », mais je choisirais «
Disintegration »
des Cure.
S :
Quelle était la dernière chanson que tu as
écoutée avant l'interview? Et si tu le sais,
quelle sera
la prochaine ?
Sv : La
dernière : une chanson de Sharko, je ne connais pas le
titre, sur une compil d’un magazine rock.
La prochaine : pourquoi pas « Where The Wild Roses Grow
», puisque tu m’y fais penser !
S :
Qu'as-tu de prévu pour le futur le plus proche?
Sv :
Des concerts pour le « Perdition Tour ». Et
peut-être
co-écrire quelques chansons avec d’autres artistes.
S : Et
finalement, quelle est la chose la plus importante dans la vie pour toi?
Sv : Son
sens.
MERCI BEAUCOUP à SvenSson et au label
Forget-Me-Not
Records pour cette interview!
Plus d'infos concernant SvenSson :
- sur son site officiel :
http://www.svensson-music.com
- ou sur son Myspace :
http://www.myspace.com/svenssonboy